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SincéritéS

Est : Il faut raison garder et militer pour la réunification de l'Allemagne !

3 Décembre 1989 , Rédigé par Jean-Pierre Llabrés Publié dans #Histoire

Ce qui se produit, actuellement, dans les pays de l'Est n'est possible que parce que Gorbatchev l'a autorisé : tant que les forces d'occupation soviétiques et les forces nationales de maintien de l'ordre ne reçoivent pas l'ordre d'intervenir, les peuples de l'Est peuvent manifester leur légitime désir de démocratie et obtenir des changements.

Réellement souhaités ou non par les appareils politiques communistes, on ne peut qu'espérer que ces changements aillent jusqu'à leur terme ultime, quel que soit le degré de sincérité des gouvernants actuels ou de leur relève. Nous connaissons suffisamment la valeur de la sincérité politique dans nos démocraties pour n'avoir pas d'illusions sur celle venant d'états totalitairement démocratiques jusqu'à il n'y a pas si longtemps ; mais qui le furent longtemps.

Mais que, demain, parce qu'il n'aurait pas obtenu de l'Ouest tout ce qu'il espère, le caméléon Gorbatchev revienne à sa couleur première (d'il n'y a pas si longtemps) ou qu'il soit détrôné par des apparatchiks n'ayant pas jugé utile d'en changer, la récréation cessera au coup de sifflet.

C'est un aveuglement que de vouloir se persuader que les choses sont allées trop loin pour qu'il puisse y avoir régression. Le passé récent (à l'échelle du communisme) nous en administre la preuve : Berlin Est, en 1953 ; Budapest, en 1956 ; Prague, en 1968.

Au mieux ou au pis, on ne sait, l'aspiration sera telle que les populations pourraient se soulever massivement. Le communisme a déjà démontré sa capacité à la répression massive et sanglante. Il est à souhaiter due de tels événements tragiques ne se produisent pas. Mais si, par malheur, ils advenaient, ne nous voilons pas la face hypocritement : l'Ouest n'interviendrait pas ! Les populations révoltées seraient seules face aux armes. Comme par le passé.

Il est certain que le mouvement est sincère à la base. Il est est bien plus difficile de l'affirmer quant aux appareils d'état et aux adhérents des partis communistes. Nous n'en aurons la preuve que lorsque de véritables se seront durablement installées de la RDA à l'URSS.

En attendant, l'Ouest doit postuler la sincérité des gouvernants de l'Est et, sans angélisme aucun, négocier son aide avec réalisme, sur le principe de la réciprocité des concessions. Nos gouvernements y parviendront-ils ?

Cependant, la question de la réunification de l'Allemane incite au pessimisme. Hors la RFA et la population de la RDA, tous affirment que la question de la réunification de l'Allemagne n'est pas opportune. Gorbatchev affirme que les frontières européennes sont intangibles et l'Ouest acquiesce. Est-il vain de vouloir y chercher une logique ?

La domination et l'occupation de l'Est résultent de l'impérialisme communiste et du désir, partagé par tous, de rendre l'Allemagne inoffensive pour ses voisins dans les années d'après-guerre durant lesquelles la dissuasion nucléaire n'existait pas pour l'URSS. Lorsqu'elle y eut accès, en août 1949, la crainte de l'Allemagne devint obsolète : sinon, à quoi sert la dissuasion nucléaire ? Dès lors, l'occupation de l'Europe de l'Est par l'URSS ne résulta plus que de l'impérialisme communiste et de l'impotence de l'Ouest, en raison du risque nucléaire, à libérer des populations asservies par leur "libérateur" de 1945... La "nécessité" de la partition de l'Allemagne devenait une mystification !

Aujourd'hui que se développe un mouvement populaire généralisé de démocratisation à l'Est, chacun s'accorde à reconnaître la légitimité de ces aspirations populaires. En quoi le désir de réunification du peuple allemand, des familles allemandes, serait-il illégitime ? En quoi serait-il dangereux pour les voisins de l'Allemagne ? À supposer qu'il existât un revanchisme allemand, dont on ne voit pas la trace, toutes les puissances nucléaires seraient capables de calmer ses ardeurs et d'en protéger ses voisins. À supposer même une Allemagne dotée de la puissance nucléaire, on n'imagine pas que la dissuasion deviendrait inopérante.

Dès lors, si Gorbatchev est sincère, c'est-à-dire si l'URSS renonce à la conquête de l'Europe de l'Ouest (sa "Maison Commune", meublée des "anciennes" valeurs communistes, serait une conquête, un squattage de l'Europe), on ne saisit pas pourquoi il s'opposerait à une réunification de l'Allemagne si le peuple de la RDA y aspire démocratiquement ; sauf à vouloir s'en servir dans des négociations futures.

Dès lors, on ne comprend pas non plus pourquoi les Européens de l'Ouest et les Américains éludent la question de la réunification de l'Allemagne tout en redoutant un glissement à l'Est de la RFA. À n'en pas douter, maintenir la partition de l'Allemagne est la meilleure voie pour attirer la RFA vers un Est d'autant plus attractif qu'il paraît moins agressif quand bien même il demeure redoutable. Ce pourrait être la meilleure voie pour obtenir la dislocation, que l'on dit redouter, de la Communauté Européenne.

On discerne toutefois une explication à cet accord général quant à la (non-)réunification de l'Allemagne : chacun souhaite la riche RFA comme partenaire tout en craignant une suprématie économique de l'Allemagne réunifiée. Curieux transfert de la crainte de l'impérialisme militaire germanique, impraticable aujourd'hui, vers le domaine économique.

Pour l'URSS, à défaut de dominer la RFA, la détention en otage du peuple allemand de RDA lui permet de réaliser des bénéfices indirects grâce au soutien de la RFA à la RDA, proche partenaire de l'URSS.

Pour les pays de l'Europe de l'Ouest, l'intérêt du partenariat avec la RFA n'est plus à démontrer. S'ils redoutent une riche Allemagne réunifiée (la RFA est déjà extrêmement riche), qu'ils cessent de geindre, relèvent le défi et considèrent leur propre puissance économique relativement à celle de leurs autres partenaires moins puissants au sein de la Communauté Européenne.

Si la construction de l'Europe doit se faire sur la base de complexes d'infériorité qui, bien souvent, ne sont que l'expression d'un complexe de fausse supériorité, il n'existe pas d'Avenir Européen !

La RFA a démontré qu'elle est politiquement ancrée à l'Ouest : en 1952, Konrad Adenauer a décliné l'offre de réunification de l'Allemagne faite par Staline. Elle a également démontré qu'elle est, aussi, économiquement liée à l'Ouest : ses marchés y sont et, si ceux de l'Est s'ouvrent et entrent en expansion, ils ne seront pas l'apanage de la seule Allemagne ; sauf abdication économique de ses partenaires européens. L'Allemagne, au contraire du Royaume-Uni, a également démontré sa capacité positive de négociation de la construction européenne, sans tirer par trop avantage de sa puissance économique.

Aussi, ne faisons pas de procès d'intentions à la RFA ou à l'Allemagne réunifiée et sachons que cette réunification constituera une preuve tangible de la réelle volonté des communistes gorbatchéviens de modifier leur propre monde. En l'état actuel des choses, la RFA n'a rien à prouver ; Gorbatchev et les autres : tout !

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