Sarkozy et l’Aide Publique au Développement (APD)
Le lecteur trouvera, ci-dessous, le courriel envoyé au Président de la République, le lundi 21 décembre 2009, via le site internet de la présidence (http://www.elysee.fr/ecrire/ : Ecrire au Président de la République).
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Objet : Aide Publique au Développement (économique) des pays en développement
Monsieur le président,
À l’occasion du sommet de Copenhague, vous avez exprimé le souhait que de nouvelles ressources financières soient dégagées pour aider au développement (économique?) des pays en développement (sous-développés ; en voie de développement ; magie du verbe...), en général, et d’Afrique, en particulier.
Depuis près de 50 ans, les Pays en Voie de Développement (PVD) bénéficient de l’Aide Publique au Développement (APD) (économique?), financée par les pays industrialisés, qui, aujourd’hui se situe aux environs de 60 milliards d’Euros annuellement (dont environ 50% financés par les pays de l’Union Européenne). Si l’on considère une moyenne annuelle de 30 milliards d’Euros annuellement pendant 50 ans, cela représente 1.500 milliards d’Euros d’aide.
Qu’en est-il résulté en termes de développement économique ? Rien !
L’APD a été initiée pour combattre l’insécurité alimentaire et améliorer le développement des produits vivriers. À ce titre, dans nombre de pays ont été construits des réseaux de stockage des céréales ainsi que des organismes de régulation des marchés céréaliers et d’amélioration de la commercialisation des céréales. Que reste-t-il de tout ces investissements ? Rien ; absolument rien ! Il n’a existé aucune pérennisation des investissements.
J’ai travaillé dans nombre de PVD comme assistant technique au développement économique et, comme mes collègues ayant travaillé dans d’autres PVD que ceux que je connais, aucun de nous n’est en mesure de citer un seul exemple d’entreprise, originellement financée par de l’APD, de l’Union Européenne ou d’ailleurs, qui se soit développée pour devenir une entreprise à part entière, autonome en expansion et rentable.
Aussi, avant de dégager de nouveaux financements, il conviendrait de rentabiliser l’APD actuelle de 60 milliards d’Euros annuels, d’en pérenniser les investissements.
Pour vous permettre de prendre la mesure du problème en matière d’insécurité alimentaire, par exemple, je vous invite à poser trois questions à vos conseillers économiques.
1)
Quelle est la production céréalière annuelle de quelques pays d’Afrique ?
2)
De cette production annuelle, quelle est la quantité qui est effectivement commercialisée par les producteurs ?
3)
Comment cette quantité effectivement commercialisée annuellement est-elle mise en marché ? Quantité mensuelle réelle (et non pas quantité globale divisée par 12 mois) ?
Je gage que vous obtiendrez réponse à la première question. Si, d’aventure, vous obtenez de justes réponses aux deux questions suivantes, vous pouvez considérer la présente comme nulle et non avenue.
Mais, immodestement, je gage également que personne ne sera en mesure de vous fournir des réponses à ces deux questions-là. Dans ce cas, par manque de place dans ce courriel, vous souhaiterez peut-être en discuter avec moi afin que je puisse vous expliquer en quoi les réponses à ces deux questions sont fondamentales en matière de lutte contre l’insécurité alimentaire dans les PVD. Vous constaterez que ces questions fondamentales sont suivies par un cortège d’autres, non moins fondamentales, dont les réponses sont totalement ignorées, par ignorance depuis des années, par les acteurs de la lutte contre l’insécurité alimentaire et les investissements au titre de l’APD.
Au terme de cette réflexion, peut-être souhaiterez-vous mettre en place une commission de réflexion sur l’APD dans la perspective d’élaboration d’une analyse approfondie de la problématique de lutte plus efficace contre l’insécurité alimentaire dans les PVD et dans celle de formulation de recommandations concrètes et réalistes en vue de la pérennisation de ces investissements en faveur de leur développement économique.
Je me tiens à votre disposition pour vous apporter toute explication complémentaire.
Croyez en ma meilleure considération.
Jean-Pierre Llabrés
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Sujet : RE : Présidence de la République
De : Présidence de la République <courrier.president@elysee.fr>
À : Jean-Pierre.Llabres@laposte.net
Date : 24/12/2009 14:01
SCP/CdO/A002666
Cher Monsieur,
Le Président de la République a bien reçu le nouveau courrier que vous lui avez adressé et m'a chargé de vous en remercier.
Je dois cependant vous indiquer que Monsieur Nicolas SARKOZY ne pourra malheureusement pas vous recevoir. Croyez bien qu'il le regrette sincèrement.
Soyez toutefois assuré de toute l’attention portée à votre démarche et à vos attentes.
Bien cordialement.
Le Chef de Cabinet
Cédric GOUBET
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De mon propos, Sarkozy (puisque le chef de cabinet Goubet répond explicitement en son nom) n’a retenu qu’une demande d’entretien inexistante...
Il lui a totalement échappé qu’avant de lui indiquer ma disposition à lui apporter toute explication complémentaire au cours d’une discussion de visu, j’avais spécifiquement précisé : « Si, d’aventure, vous obtenez de justes réponses aux deux questions suivantes, vous pouvez considérer la présente comme nulle et non avenue ».
Cette précision rendait caduque toute perspective d’entretien étant donné que, dans ce cas, je considérai qu’il disposait de toute l’information nécessaire et ne nécessitait, en aucune manière, ma compétence dans le domaine de l’APD, des stratégies de sécurité alimentaire et de la commercialisation des produits vivriers. La réponse qui m’a été faite démontre que ce n’est absolument pas le cas !
D’aucuns se demanderont ce qu’ont de fondamental les trois questions posées, à savoir :
1)
Quelle est la production céréalière annuelle de quelques pays d’Afrique ?
2)
De cette production annuelle, quelle est la quantité qui est effectivement commercialisée par les producteurs ?
3)
Comment cette quantité effectivement commercialisée annuellement est-elle mise en marché ? Quantité mensuelle réelle (et non pas quantité globale divisée par 12 mois) ?
À elles trois, elles résument la problématique de la sécurité alimentaire après laquelle courent depuis plus d’un demi siècle les « pays émergents »
avec le financement à fonds perdus et l’aide totalement inefficiente des pays développés :
1)
Dans les quelque 25 pays « en développement » (par la magie du verbe : « sous-développés » puis « en voie de développement » et, enfin, « en
développement ») où j’ai œuvré et, d’après mes sources, dans nombre d’autres pays, les statistiques agricoles sont en mesure d’estimer le niveau des récoltes de produits vivriers.
2)
Mais, nulle part, n’est prise en considération la quantité effectivement commercialisée (Récolte – autoconsommation des ménages producteurs, - réserves pour semences, - et cætera). Or, cette
carence constitue l’ignorance de l’essence même du Marché de Vivriers que tous les gouvernements souhaitent réguler en faveur des agriculteurs. Comment espérer réguler un marché que l’on n’a même
pas l’idée d’identifier et de mesurer ?
3)
De plus, à l’ignorance du marché des vivriers, s’ajoute celle des modalités de commercialisation de leurs excédents par les agriculteurs. Celles-ci leurs sont totalement défavorables car, sans
trésorerie confortable, ils se trouvent contraints de vendre la quasi totalité de leurs excédents quasiment au moment de la récolte annuelle. Ces ventes massives, en un temps relativement très
bref, provoquent la forte baisse des cours dont profitent les commerçants qui, par la suite, revendent à des prix bien plus élevés, engrangeant des profits qui échappent aux producteurs. De ce
fait, ces derniers ne peuvent absolument pas entrer dans le cercle vertueux suivant : amélioration des profits, accroissement de la capacité d’investissement, augmentation de la
productivité, ... et recommencement.
Depuis plus d’un demi siècle, les bailleurs de fonds de l’APD s’avèrent incapables de résoudre cette problématique et leurs financements se perdent, non pas dans les détournements, mais dans des projets de développement parfaitement ineptes.
C’est pourquoi, avant d’augmenter les financements de l’APD, il conviendrait d’élaborer des stratégies efficientes de développement.
Au vu de ce qui précède, chacun se fera son opinion sur la pertinence et sur la compétence de Sarkozy en la matière. En espérant qu’il n’en aille pas de même dans tous les autres domaines où il intervient...
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